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Espagne: La reprise économique. Oui, mais… Nicolas Klein

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Espagne, une balance commerciale toujours gravement déficitaire! Avant-propos: Nicolas Klein nous présente ci-dessous une certaine évolution positive si l’on compare avec 2010. Pourtant malgré une activité économique en croissance, l’Espagne continue de présenter un solde commercial négatif qui s’amplifie dès que l’on ajoute le facteur « énergie ». Une évolution de l’activité économique globalement positive depuis les subprimes avec toutefois un bémol depuis 2013 dû à des importations en augmentation… https://www.tresor.economie.gouv.fr/Articles/1e94a213-b3ac-4185-b540-9d828bf97292/images/ff0e1198-50fa-4900-8a98-1730548632f1 Le déficit commercial espagnol de biens se dégrade de 42 % en 2017 par rapport à l’année antérieure, pour atteindre 24,7 Md €. Cette détérioration résulte d’une

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Espagne, une balance commerciale toujours gravement déficitaire!

Avant-propos:

Nicolas Klein nous présente ci-dessous une certaine évolution positive si l’on compare avec 2010.

Pourtant malgré une activité économique en croissance, l’Espagne continue de présenter un solde commercial négatif qui s’amplifie dès que l’on ajoute le facteur « énergie ».

Une évolution de l’activité économique globalement positive depuis les subprimes avec toutefois un bémol depuis 2013 dû à des importations en augmentation…

Espagne: La reprise économique. Oui, mais… Nicolas Klein

https://www.tresor.economie.gouv.fr/Articles/1e94a213-b3ac-4185-b540-9d828bf97292/images/ff0e1198-50fa-4900-8a98-1730548632f1
Espagne: La reprise économique. Oui, mais… Nicolas KleinLe déficit commercial espagnol de biens se dégrade de 42 % en 2017 par rapport à l’année antérieure, pour atteindre 24,7 Md €. Cette détérioration résulte d’une croissance des importations en valeur (+10,3% a/a) plus soutenue que celle des exportations (+8,1 % a/a), du fait notamment du dynamisme de la demande interne et de la hausse du cours du pétrole. Les principaux secteurs ont augmenté leurs exportations, hormis l’automobile dont les ventes ont été similaires à celles de 2016. Les exportations espagnoles, en progression chaque année depuis 2009, atteignent ainsi un pic historique en 2017, dépassant 277 Md € de biens exportés.
La situation commerciale hors énergie s’est fortement dégradée puisque l’Espagne enregistre un déficit commercial hors énergie de 4,0 Md € en 2017 (contre 0,8 Md € en 2016).https://www.tresor.economie.gouv.fr/Articles/2018/05/10/le-commerce-exterieur-de-l-espagne-en-2017

(Cf notre Dossier Target 2)

LHK

… Pourtant reprise il y a depuis les subprimes… Nicolas Klein

Pourtant, depuis la reprise économique de 2014, beaucoup de choses ont évolué en Espagne et la situation économique du pays n’est sensiblement plus la même. Cette année-là, la croissance du produit intérieur brut est enfin de retour avec 1,4 %, avant d’enchaîner plusieurs périodes de forte progression (+ 3,4 % en 2015, + 3,3 % en 2016, + 3,1 % en 2017)[1].

Même la Commission européenne, d’ordinaire prudente et critique à l’égard des pays d’Europe du Sud, se montre optimiste pour la suite des événements et envisage des résultats meilleurs que prévu : + 2,9 % pour 2018 et + 2,4 % pour 2019[2].

Au début de cette année, le pays a même officiellement retrouvé son niveau de richesse d’avant la crise[3], tandis que le PIB par habitant des Espagnols (calculé selon la méthode de la parité de pouvoir d’achat) a dépassé celui des Italiens au mois d’avril[4].

L’investissement, qui avait chuté jusqu’à 91,6 en 2015 (en comparaison d’une base 100 en 2010) a presque récupéré son niveau initial, tandis que la consommation domestique est repartie (100,1)[5]. Après avoir soldé une bonne partie de leur endettement, les citoyens se sont même remis à contracter des crédits afin de procéder à des achats de biens de consommation durable (automobile, électroménager, etc.) différés pendant plusieurs années[6]. La production de service a progressé jusqu’à 108,8 et la production manufacturière, de son côté, s’est largement consolidée (111,4)[7].

Le chômage, régulièrement cité comme l’une des principales préoccupations quotidienne des Espagnols[8], a lui aussi beaucoup décru.

En effet, après avoir atteint son pic en 2013 à près de 27 % de la population active, il a régulièrement chuté avec 24,47 % à la clôture de l’année 2014, 22,37 % en 2015, 18,63 % en 2016 et 16,55 % en 2017[9]. À la fin d’avril 2018, il y avait un peu plus de 3,3 millions de demandeurs d’emploi outre-Pyrénées, dans une conjoncture favorable portée par la Semaine sainte, événement majeur de l’année en Espagne[10].

Cette baisse constatée par les autorités espagnoles (dont la ministre de l’Emploi et de la Sécurité sociale, Fátima Báñez) ne correspond pas qu’à des artifices comptables ou des radiations puisque le nombre de travailleurs qui cotisent pour financer le système social espagnol a lui aussi progressé depuis 2013. C’est cette année-là qu’il a plongé jusqu’à un peu plus de 16,3 millions de personnes (depuis un maximum de 19,3 millions environ en 2007) avant de remonter progressivement la pente : 16,7 millions environ en 2014, 17,3 millions approximativement en 2015, 17,8 millions en 2016 et 18,4 millions en 2017[11]. Plus de 410 000 personnes sont entrées sur le marché de travail en 2014, plus de 530 000 en 2015, plus de 540 000 en 2016 et plus de 610 000 en 2017 (cette dernière donnée constituant un record depuis 2005, année de vaches grasses)[12].

En avril 2018, la Sécurité sociale espagnole avait déjà récupéré 75 % des cotisants qui avaient perdu leur emploi au cours de la crise et affichait plus de 18,6 millions de travailleurs officiellement recensés, soit un record depuis novembre 2008[13]. Dans son programme de stabilité envoyé à Bruxelles le même mois, le gouvernement présidé par Mariano Rajoy se montrait confiant et estimait pouvoir atteindre le plein emploi (soit un peu plus de 20 millions d’actifs occupés) d’ici à 2019[14].

Il faut dire que les perspectives de l’exécutif sont positives pour 2018, avec une chute prévue du nombre de demandeurs d’emploi de 450 000 personnes et un taux de chômage à 15,3 % à la fin du mois de décembre[15].

Parmi les secteurs les plus dynamiques de l’économie espagnole, le tourisme est probablement celui qui génère le plus d’emplois et le plus rapidement possible[16] (même si ces emplois sont saisonniers et soumis à une grande précarité). Plus de 82 millions de visiteurs étrangers ont traversé les Pyrénées en 2017, ce qui constitue un record absolu pour notre voisin ibérique, marque une augmentation de 8,9 % par rapport à 2016 et fait de l’Espagne le deuxième pays le plus touristique de la planète (derrière la France)[17]. Désormais, le tourisme représente 11 % de la richesse produite en un an dans le pays – contre 10 % auparavant[18]. Quant à la dépense moyenne par touriste, elle a explosé entre 2010 (base 100) et 2017 (142)[19].

Autre indicateur important : les exportations de biens et de services, qui n’ont cessé d’augmenter depuis 2010 (année base) pour culminer à 135 l’année dernière[20].

Comment expliquer la reprise ?

Ces évolutions très favorables de l’économie espagnole poussent de nombreux observateurs à se demander si la crise est enfin finie dans le pays, après une décennie de grandes difficultés[21]. Des économistes du monde entier ont même vanté les réformes du gouvernement de Mariano Rajoy – bien qu’elles n’aient, à notre sens, pas grand-chose à voir avec ce rebond du pays[22]. Est alors revenue sur le devant de la scène l’idée que la France devrait s’inspirer de son voisin ibérique afin de sortir de l’ornière et abandonner la stagnation, notamment sur le marché de l’emploi[23].

C’est surtout le formidable essor des exportations espagnoles qui a attiré l’attention des journalistes et experts, alors que la référence continentale en la matière est l’Allemagne. Dès avril 2015, un rapport réalisé par des chercheurs de deux universités allemandes (Tübingen et Bonn) ainsi qu’une autre danoise (Aarhus) évoquait un véritable « miracle exportateur » hispanique, avec une croissance de 13 % des ventes à l’étranger entre 2007 et 2013, en pleine crise économique et avec des investissements au plus bas. Les auteurs de cette étude évoquaient même certaines similitudes en la matière entre Madrid et Berlin[24]. Dans le même temps, les multinationales espagnoles de la construction et de l’ingénierie (Sacyr, Ferrovial, ACS, FCC, Acciona, OHL, etc.) marquent le monde de leur empreinte avec une série de juteux contrats dans de nombreux pays et un savoir-faire reconnu à l’international[25]. Plus globalement, en cette année 2018, les firmes dont le cours est établi au sein de l’IBEX 35 (principal indice de la Bourse de Madrid) génèrent 67,7 % de leurs revenus à l’étranger, avec des noms célèbres comme Santander ou BBVA (banque), Telefónica (télécommunications), Inditex (textile) ou encore Repsol, Iberdrola et Gas Natural Fenosa (énergies fossiles et renouvelables)[26].

Quels facteurs sont à même d’expliquer l’internationalisation des compagnies ibériques et, en parallèle, le redressement rapide de l’économie de notre voisin pyrénéen ? Ce dernier souffre encore de nombreux maux. Une telle reprise n’était d’ailleurs pas prévue par bien des spécialistes.

Plusieurs éléments ont été avancés par ces derniers pour tenter de comprendre ce qui était en jeu : faible coût du baril de pétrole, baisse du taux de change entre l’euro et le dollar, contention des salaires, etc.

Il n’y a rien de faux dans ce constat. Oui, l’Espagne a bien bénéficié de facteurs extérieurs favorables à sa reprise. Naturellement, la diminution du coût du travail a joué sur la compétitivité du pays – cette dernière étant le grand mantra de notre temps. Bien entendu, les Espagnols se sont serrés la ceinture, ont souffert et continuent de souffrir de la politique de « dévaluation interne » pratiquée par les derniers gouvernements. Pourtant, d’autres nations européennes, notamment au Sud, ont bu les mêmes potions amères sans obtenir de résultat probant (c’est le cas de la Grèce et de l’Italie) ou en présentant une reprise moins frappante que celle de l’Espagne (comme le Portugal, souvent donné en exemple ces derniers mois[27] mais dont la convergence avec le reste de l’Europe occidentale est très en retard par rapport à celle de l’Espagne[28]).

Une explication ultime est parfois soulevée : l’Espagne se contenterait de connaître un « rebond mécanique » après des années de crise. Cette conception automatique de l’économie passe sous silence ou ignore des facteurs et atouts propres à ce pays.

Il ne s’agit certainement pas de dire que tout va très bien outre-Pyrénées. Les défis auxquels sont confrontés le pays sont immenses et il est douteux que sa classe politique actuelle (tous partis confondus) soit à même de les relever avec succès. Par ailleurs, les fameuses « réformes structurelles » dont Mariano Rajoy est si fier entrent en contradiction avec un certain nombre de forces de l’économie espagnole, peuvent parfois représenter un handicap et ont moins joué que ce que le président du gouvernement aime à affirmer pour des raisons électorales. L’Espagne, comme bien souvent, résiste néanmoins aux simplifications, aux prévisions triomphalistes ou alarmistes et demande de la nuance et une analyse plus en détail que celle qui est souvent fournie. C’est ce à quoi nous voulons modestement nous atteler ici, sachant que nous ne saurions bien entendu balayer l’ensemble du sujet.

Nicolas Klein, agrégé d’espagnol, et professeur en classe préparatoire aux grandes écoles à Nancy

[1] Voir les tableaux de Datos Macro : https://www.datosmacro.com/pib/espana.

[2] Voir Roig, Miquel, « Bruselas se muestra optimista con España y mejora la previsión del PIB al 2,9% », Expansión, 3 mai 2018.

[3] Voir Segovia, Carlos, « España recupera el PIB previo a la crisis tras una década perdida », El Mundo, 28 avril 2017.

[4] Voir « « L’Espagne dépasse l’Italie dans la coupe d’Europe des richesses », décrypte Lenglet », RTL, 20 avril 2018.

[5] Voir Vega, José Antonio, op. cit.

[6] Voir Maqueda, Antonio, « Las familias dejan de reducir deudas y vuelven a demandar financiación », El País, 8 mai 2018.

[7] Voir Vega, José Antonio, op. cit.

[8] Voir, par exemple, « CIS. Las 10 principales preocupaciones de los españoles », EFE, 5 février 2018.

[9] Voir González, Manuel et Sevillano, Luis, « Evolución histórica de la tasa de paro en España », El Mundo, 23 juillet 2015 ; Munera, Isabel, « El año 2016 cierra con 541.700 parados menos y la tasa cae al 18,63% », El Mundo, 26 janvier 2017 et « El paro bajó en 471.100 personas en 2017, hasta una tasa del 16,55%, la menor desde el año 2008 ».

[10] Voir Salvatierra, Javier, « El paro bajó en abril en 86.683 personas y la afiliación subió en 176.373 », El País, 4 mai 2018.

[11] Voir « Imagen del día: la evolución de la afiliación a la Seguridad social », Idealista, 5 janvier 2017 et « La Seguridad social ganó 611.146 afiliados en 2017, el mejor resultado desde 2005 », Europa Press, 3 janvier 2018.

[12] Voir « La Seguridad social ganó 611.146 afiliados en el 2017, el mejor año desde 2005 », El Periódico, 3 janvier 2018.

[13] Voir « La Seguridad social recupera el 75% de los afiliados y cuenta ya con 18.671.461 personas », site du Ministère de l’Emploi et de la Sécurité sociale, 4 mai 2018, et « España podría recuperar en 2019 el número de afiliados de antes de la crisis », El Economista, 30 mars 2018.

[14] Voir Viñas, Jaume, « El Gobierno espera llegar el próximo año a casi 20 millones de empleados », Cinco Días, 27 avril 2018.

[15] Voir « El año que viene se crearán 450.000 nuevos puestos de trabajo y la tasa de paro descenderá al 15,3% », ABC, 21 décembre 2017.

[16] Voir Munera, Isabel, « El boom del turismo impulsa el empleo: el paro baja en 182.600 y hay 235.900 ocupados más », El Mundo, 26 octobre 2017.

[17] Voir « Récord de llegadas: más de 82 millones de turistas internacionales han viajado a España en 2017 », La Vanguardia, 10 janvier 2018.

[18] Voir « El sector turístico ya representa más del 11% del PIB de España », Reuters, 18 décembre 2017.

[19] Voir Vega, José Antonio, op. cit.

[20] Id.

[21] Voir Sánchez Vicente, Teresa, op. cit.

[22] Voir « La economista jefe de la OCDE: «Estamos sorprendidos con España» », ABC, 3 juin 2015.

[23] Voir « Sortie de crise : comment l’Espagne nous fait la leçon », Capital, 5 mai 2015 et Rivaton, Robin, « Quand l’Espagne nous montre le chemin à suivre », Les Échos, 19 juillet 2013.

[24] Voir « España vive un «milagro exportador», según un estudio de varias universidades europeas », ABC, 10 avril 2015.

[25] Voir Arechederra, Luis P., « Las constructoras españolas dejan su huella en medio mundo », ABC, 26 août 2014.

[26] Voir Chislett, William, Spain’s main listed companies notch up record revenues abroad, Madrid : Institut royal Elcano, 2018.

[27] Voir, par exemple, Horny, Gérard, « Le rétablissement du Portugal ? Une réussite incontestable, pas un modèle », Slate, 8 mai 2018.

[28] Voir ce tableau fourni par le site officiel d’Eurostat : http://ec.europa.eu/eurostat/tgm/table.do?tab=table&init=1&language=fr&pcode=tec00114&plugin=1. Si la richesse par habitant moyenne de l’Union européenne s’établit à 100, le Portugal a chuté de 83 en 2006 à 75 en 2012 avant de remonter l’année suivante à 77, mais elle stagne depuis. À titre de comparaison, à l’heure actuelle, l’Estonie est à 75, tout comme la Lituanie, et il n’est pas du tout impossible que ces deux pays dépassent le Portugal d’ici à un ou deux ans. L’Espagne, qui était à 103, a baissé jusqu’à 89 en 2013 avant de progresser jusqu’à 92 en 2016.

Liliane HeldKhawam
Bienvenue sur le blog personnel de Liliane Held-Khawam! Vous trouverez ici plusieurs publications parues dans la presse ou dans des revues spécialisées. Liliane Held-Khawam est née à Héliopolis (Egypte) et a vécu au Liban, en France, Suisse, Etats-Unis.

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